Entretien avec Degmo Ali , la Directrice Exécutive de l’lnitiative Panafricaine pour le développement économique et social.

L’initiative Panafricaine pour le Développement est désormais implantée dans les Pays du Sahel depuis l’ouverture récente de votre bureau régional à Ouagadougou au Burkina Faso , pouvez-vous nous décrire les objectifs et missions de votre organisme qui connait actuellement un succès notable ainsi qu’une influence croissante à l’échelle continentale?  Quelles sont également vos ambitions pour les pays du sahel dont le Tchad fait partie?

L’Initiative Panafricaine pour le Développement social et économique est un fonds spécialisé dans le secteur des énergies renouvelables, qui a été mobilisé et créée par le secteur privé africain et international avec le concours d’experts du développement ayant à coeur la responsabilité sociale des entreprises ainsi que l’importance de l’éducation et du transfert des technologies nord/sud et sud/sud comme vecteur du progrès humain. Notre pôle social pour les Pays du Sahel dont le Tchad a pour fils conducteurs la lutte contre la désertification et le dérèglement climatique  ainsi que l’éducation des femmes et des enfants en milieu rural ; enjeu majeur sur lequel repose le pilier du développement durable et équitable. Cela passe à travers  la formation et l’outillage intellectuels des populations agropastorales à l’économie verte comme moyen d’autosuffisance et d’émancipation économique. L’économie verte est par ailleurs indissociable de l’énergie verte , il a donc été cohérent pour notre initiative d’oeuvrer avec Monsieur Brahim Saad,  entrepreneur de renommée internationale et PDG de Syscom,  spécialisé dans les énergies renouvelables et les télécoms , qui est désormais notre Représentant accrédité auprès des 5 pays du Sahel. En effet, l’expérience et l’expertise de haut niveau des acteurs clés de notre structure favorisent l’efficience de notre action en faveur du développement rural et local sahélien.

Comment appuyer le rôle de la femme africaine qui est au coeur des enjeux du développement durable et de la justice climatique?

Les femmes représentent les meilleurs alliés du progrès et de la lutte contre la pauvreté lorsqu’elles ont accès à toutes les ressources socio-économiques  propices à leur épanouissement et leur développement personnel. À cet égard, il est essentiel d’améliorer la condition féminine afin de lutter contre la marginalisation économique et culturelle qui prive la cellule familiale de précieux revenus. Des études récentes du PNUD ont fait valoir que si l’on garantissait aux femmes le même accès que les hommes aux ressources  (accès à l’éducation, la propriété , aux services et crédits agricoles ) les exploitations gérées par les agricultrices pourraient voir leur production augmenter de 20 à 30%, ce qui permettrait de réduire de 100 à 150 millions le nombre de personnes souffrant de la malnutrition. D’où la nécessité de promouvoir et encourager l’égalité des genres dans les prises de décision et postes à responsabilité, mais également dans les programmes d’appui sectoriel .

L’idéal panafricain connait actuellement un regain d’intérêt surtout au niveau économique, mais comment rassembler de manière efficace et parer aux menaces sécuritaires qui assombrissent les prospectives du continent?

Le terrorisme représente aujourd’hui le mal et la lâcheté absolus à l’échelle planétaire. À l’échelle continentale , le sursaut doit être avant tout citoyen, interreligieux et transculturel afin de lutter en profondeur contre l’embrigadement de la jeunesse en mal de repères dans le cycle endémique de la violence. En effet ,la paix est indissociable du développement c’est pourquoi la prévention et la résolution des conflits doivent conjuguer interculturalité ,altérité et cohésion panafricaine. La valorisation de l’identité africaine contribue à rehausser l’estime et la confiance des citoyens en un modèle qui draine et non qui pousse à la fuite (migrants ). À cet égard, la notion d’appartenance à une citoyenneté à la fois mondiale et africaine n’est pas incompatible.Il s’agit donc de cultiver l’émulation de l’esprit panafricain qui consiste à réussir et entreprendre localement tout en circulant globalement . Le mythe de l’exil ne doit plus être une fin en soi. L’africanité est notre dénominateur commun, c’est pourquoi il faut encourager les initiatives culturelles ,économiques politiques telles que l’intégration socio-économique visant à favoriser un dialogue apaisé, éclairé , et constructif entre les peuples et les États. Ces échanges constructifs encouragent à appréhender “l’autre comme soi- même” selon la formule consacrée du philosophe Paul Ricoeur. Elles esquissent le faisceau d’espoir et de tolérance qui in fine sèmera la culture de la paix dans les esprits ; car la recherche de la concorde panafricaine est avant tout un processus endogène prenant naissance au coeur de la société aujourd’hui mondialisée, mais qui cherche à se rapprocher des valeurs locales et ancestrales , porteuses de sens. Cette conscientisation sera déterminante pour prévenir, répondre et obvier à la radicalisation , le repli sur soi et la négation de l’altérité qui freinent la réalisation du rêve africain. De par sa transversalité, la thématique panafricaine constitue l’ossature fondamentale du continent berceau et témoin de l’humanité :

Cette Afrique tant de fois piétinée et exploitée, mais jamais à terre, car elle est la terre elle-même.

Votre parcours d’excellence au niveau international représente un exemple positif pour la jeunesse africaine. Quels conseils et encouragements pouvez-vous leur adresser ? 

À mes jeunes concitoyens africains , je renouvelle mon admiration pour leur vitalité et force créative qui portent notre continent vers un destin et dessein commun riche de promesses. La vie est un important combat qu’il faut mener la tête haute et le coeur entier auprès des siens, mais surtout auprès de ceux qui ont besoin de nous, les plus vulnérables et moins chanceux. Peu importent vos capacités financières, sachez que l’émotion et la mobilisation pour les causes humaines et sociales définiront votre valeur et vraie grandeur à l’échelle d’une vie. La véritable réussite ne se mesure point à la richesse matérielle, mais à l’aune de la dignité , de la bravoure face à l’adversité et de l’intégrité.

Bio express

  • Née à Tunis , de nationalité djiboutienne
  • Membre du Bureau exécutif du Forum pour le dialogue Arabo-Africain (Unesco,OIF,Ligue Arabe) dont le Président est l’ancien Président du Sénégal et Secretaire Général de la Francophonie S.E. Abdou Diouf
  • Membre du Centre de réflexion «Imagine Africa» créée par Boutros Boutros Ghali ,
  • Chercheur en géopolitique des crises
  • Directrice exécutive de l’Initiative Panafricaine pour le Dévelopement
  • Membre du Conseil d’administration du “Fonds vert Femmes” du “Regions of climate action” (R2O), créee en 2010 par Arnold Schwarzenegger et Michèle Sabban avec les 20 plus grandes régions du monde, dont la Californie, Séoul ,Sao Paulo et Dakar en faveur de l’action climatique
  • Ambassadrice itinérante de bonne volonté pour le “Oceania 22 Global Summit” (coalition des 22 pays et territoires de l’Océanie et du Pacifique pour la préservation des peuples premiers contre le réchauffement climatique)
  • Membre du Conseil d’administration du “Moroccan Development Forum” dont le siège est à Bruxelles (en charge de la coopération arabo-africaine avec l’Union Européenne)