Les Nations Unies se manifesteront dans les semaines et mois à venir par un engagement ferme en appui en armements, formations militaires et assistance humanitaire, pour permettre une lutte plus efficace contre Boko Haram dans la région du lac Tchad, a annoncé une mission du Conseil de sécurité de l’ONU vendredi à Maroua, dans le nord du Cameroun.

“Des assistances vont venir en termes de formations, d’équipements, de financements. Les militaires l’ont expliqué tout à l’heure, ils ont évalué les besoins. Le Sénégal n’a pas d’armements, mais les grands pays ont entendu et je crois que ça va être fait”, a déclaré Fodé Seck, le représentant permanent du Sénégal auprès des Nations Unies à New York, interrogé par Xinhua.

Le pays d’Afrique de l’Ouest siège aux côtés des Etats-Unis, de la Chine, de la Grande-Bretagne, de la Russie et de la France, les cinq membres permanents, en tant que l’un des dix pays non permanents du Conseil de sécurité de l’ONU. Les neuf autres sont l’Egypte, l’Ethiopie, la Suède, l’Ukraine, l’Uruguay, la Bolivie, l’Italie, le Kazakhstan et le Japon.

Sans la Russie, une mission de cette instance décisionnelle de l’organisation mondiale a visité vendredi après-midi Maroua, le chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord, quelques heures après avoir rencontré le président camerounais Paul Biya, pour une tournée dans la région du lac Tchad affectée par Boko Haram, entamée la veille à Yaoundé et poursuivie aussitôt après à N’Djamena (Tchad).

Cette tournée est la première du genre depuis le déclenchement de l’offensive militaire camerounaise contre la secte islamiste nigériane en 2014 suivi de la formation l’année d’après d’une coalition commune avec le Nigeria, le Tchad et le Niger du nom de Force mixte multinationale (FMM) de la Commission du Bassin du lac Tchad (CBLT), avec la participation du Bénin.

Le projet de création de cette force avait prévu qu’elle soit dotée d’un mandat de l’ONU, après avoir été entérinée par l’Union africaine (UA). Deux ans après, cette étape n’a pas été franchie et l’opérationnalisation de la FMM a du mal à atteindre sa pleine capacité, à cause de l’insuffisance de financements.

C’est un handicap qui empêche de consolider les progrès notables enregistrés par les quatre pays dans leur lutte antiterroriste marquée par un affaiblissement militaire du groupe djihadiste nigérian, obligé de changer de tactique pour recourir aux attentats suicides avec moins de possibilité de mener des attaques massives.

“Nous sommes venus dans le Nord du Cameroun parce que nous sommes préoccupés par le fait que la crise qui affecte l’ensemble de la région du Bassin du lac Tchad a été négligée. Il n’y a pas eu une grande attention au sujet de la situation qui se vit ici et nous voulons corriger cela”, a admis face à la presse Matthew Rycroft, l’ambassadeur de Grande-Bretagne et président du Conseil de sécurité.

Depuis 2014 pourtant, plus de 1.500 civils et militaires ont été égorgés et mutilés dans les violences commises par Boko Haram au Cameroun, selon les estimations officielles. Près de 200.000 déplacés internes et près de 90.000 réfugiés nigérians sont recensés.

Le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) estime à 3,2 millions le nombre de personnes en besoin de protection et d’assistance humanitaire au cours de cette année dans l’ensemble des quatre pays. Plus de la moitié de ces personnes sont des femmes et des enfants, précise-t-il.

Parmi elles encore, environ 2,8 millions se trouvent en situation d’insécurité alimentaire, s’alarme l’agence onusienne. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a évalué à 241,2 millions de dollars les besoins pour venir en aide à 457.833 réfugiés et déplacés dans la région, un chiffre en hausse comparé aux 198 millions de dollars estimés pour 2016.

La mission du Conseil de sécurité dans l’Extrême-Nord du Cameroun s’est résumée par des échanges avec des leaders traditionnels et des élus municipaux, des groupes de réfugiés et de déplacés, des autorités administratives et militaires locales, à l’aéroport de Maroua.

Selon l’ambassadeur de France, François Delattre, ces échanges ont permis de mesurer “mieux encore qu’avant (…) combien c’était une erreur que la région du lac Tchad ne soit pas vraiment sur l’écran radar de la communauté internationale”.

“Et nous sommes venus là pour faire en sorte que dans les semaines et les mois qui viennent la lutte contre Boko Haram, la réponse à l’urgence humanitaire qui s’y exprime, la recherche de mettre ensemble tous les moyens du développement durable soient une priorité de la communauté internationale et du Conseil de sécurité”, a ajouté le diplomate.

“Je peux vous dire que les rencontres que nous venons d’avoir avec les déplacés, avec les réfugiés, avec ces femmes et ces hommes qui ont tant souffert dans leur chair mais qui ont des rêves et qui considèrent que pour que ces rêves deviennent réalité le Conseil de sécurité doit s’engager. Après ces rencontres, oui nous allons nous engager”, a-t-il insisté.

L’ambassadeur des Etats-Unis, Michele J. Sison, elle, a réaffirmé la volonté de développer des partenariats forts avec les pays de la région. “Nous sommes à vos côtés dans la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme. Nous avons appris la manière dont Boko Haram a détruit les vies des femmes, des filles, des jeunes”, a-t-elle déploré.

La relance de l’économie ruinée par la crise, le développement de l’agriculture, principale source de revenus des populations locales avec l’élevage, l’aide humanitaire et l’appui militaire sont les priorités définies par la mission pour les interventions futures envisagées.